Dans le champ de l’accompagnement — qu’il s’agisse de sophrologie, de thérapies brèves ou de toute autre pratique — la question de la posture du thérapeute est selon moi, centrale. Elle ne se résume pas à une technique ou à un savoir-faire, mais relève d’un savoir-être, d’une présence juste et consciente auprès de la personne accompagnée et en aucun cas d’une posture de sachant.
Trop souvent, l’accompagnant peut être tenté, parfois inconsciemment, de vouloir “sauver”, “réparer” ou “guider” l’autre vers ce qu’il croit être “le mieux pour lui”. Mais cette posture, bien qu’animée de bonnes intentions, peut glisser vers une forme de pouvoir ou de projection. Le risque ? Enfermer la personne dans un modèle, une vérité ou une vision qui n’est pas la sienne.
Or, accompagner véritablement, c’est honorer le libre arbitre de l’autre, reconnaître qu’il est le seul expert de son vécu, et lui offrir un espace où il peut se (re)découvrir à son rythme.
J’ai moi-même été accompagnée par des personnes notamment en lien avec le transgénérationnel ou l’énergétique qui affirmait des vérités. Non ! Même lorsque l’on canalise des informations, le thérapeute ou l’accompagnant se doit de s’interroger sur ses propres filtres et en aucun cas énoncer des vérités ou conforter le consultant dans des croyances !
La juste posture : présence, humilité et non-jugement
Le premier pilier de la posture du thérapeute, c’est la présence. Être pleinement là, avec et pour l’autre, sans chercher à analyser, à interpréter ou à juger.
Cette qualité de présence crée un climat de sécurité intérieure, de confiance essentiel pour que la personne ose déposer ce qu’elle vit, dans toute sa vulnérabilité.
(un article ici sur l’importance de se sentir en confiance pour se faire accompagner : https://celinecaille-resonance.fr/se-sentir-en-confiance-et-en-securite-une-condition-essentielle-pour-se-faire-accompagner/)
L’humilité est le second pilier. Le thérapeute n’est pas “celui qui sait”, mais celui qui accompagne à faire émerger les ressources intérieures de la personne. Cela demande de renoncer à la posture d’expert au profit de celle de facilitateur : un miroir bienveillant qui aide l’autre à prendre conscience de ses ressources, de ses fonctionnements et de ses possibles.
Enfin, le non-jugement constitue évidemment la base éthique de toute relation d’aide. Il ne s’agit pas d’être neutre, mais de rester ouvert et curieux, sans chercher à catégoriser ce qui est “bien” ou “mal”. C’est cette neutralité bienveillante qui permet à la personne accompagnée de se sentir accueillie dans sa globalité, sans crainte d’être évaluée ou jugée.
Accompagner sans imposer : la tentation des vérités absolues
Dans un monde où les courants de développement personnel se multiplient, il est facile de tomber dans le piège des “vérités toutes faites”.
Des phrases comme “tout vient de ton mental”, “tu attires ce que tu vibres” ou “il faut lâcher prise” peuvent, à force de simplification, devenir des injonctions culpabilisantes.
Le rôle du thérapeute n’est pas de transmettre une vérité, mais d’aider la personne à trouver la sienne, à reconnecter avec son chemin intérieur.
Chaque individu porte une histoire, une sensibilité, un rythme. Ce qui a fonctionné pour l’un ne sera pas nécessairement juste pour l’autre. L’accompagnant doit donc apprendre à laisser de l’espace au mystère, à ce qu’il ne comprend pas encore, et à ce que l’autre ressent différemment.
Cette posture d’écoute ouverte et respectueuse invite à une véritable autonomisation : la personne devient actrice de son propre cheminement, plutôt que de dépendre d’une autorité extérieure.
En sophrologie : l’expérience avant le discours
La sophrologie illustre parfaitement cette philosophie.
Plutôt que de délivrer un savoir “sur” la personne, elle l’invite à vivre une expérience, à ressentir dans son corps, à observer ses sensations, à vivre les phénomènes qui sont présents.
(pour en savoir plus sur la pratique de la Sophrologie : https://celinecaille-resonance.fr/principes-de-la-sophrologie/)
Le sophrologue ne dit pas “voici ce que vous devez ressentir”, mais propose :
“Je vous invite à accueillir ce qui se présente, sans attente, sans jugement, sans analyse.”
Cette nuance change tout.
Elle replace la personne au centre de son expérience, lui redonne le pouvoir d’observer, de nommer, de choisir.
Ainsi, l’accompagnement devient un espace d’expérimentation consciente, où chacun apprend à se reconnecter à ses propres ressources internes.
Le libre arbitre comme chemin vers la confiance
Laisser à la personne son libre arbitre, c’est aussi lui faire confiance.
Confiance en sa capacité de discernement, en sa sagesse intérieure, en son rythme de transformation.
Le thérapeute n’a pas à décider quand ni comment le changement doit se produire. Il crée les conditions favorables, mais c’est la personne qui agit depuis son propre centre, depuis sa propre réalité.
Cette confiance mutuelle — du thérapeute envers la personne, et peu à peu de la personne envers elle-même — constitue le cœur même de la relation d’aide.
C’est elle qui rend le travail durable, car la personne n’adopte pas une nouvelle croyance ou un nouveau modèle : elle apprend à écouter sa propre boussole intérieure.
L’éthique du “non-savoir”
J’aime beaucoup cette notion. Un grand psychologue de renom a dit : « si les thérapeutes n’appréhendent pas chacun de leur RDV, (dans le sens « se remettre en question, douter de soi »), ils ne sont pas bons« .
Accompagner, c’est aussi accepter de ne pas tout savoir.
C’est se tenir dans un espace d’incertitude, avec humilité.
Parfois, la meilleure réponse à offrir n’est pas une explication, mais une présence silencieuse, un regard bienveillant, ou une question qui ouvre plutôt qu’elle ne ferme.
Cette posture du “non-savoir” n’est pas une faiblesse : c’est une forme de sagesse relationnelle, de lien, et d’égal à égal.
Elle empêche l’égo du thérapeute de se confondre avec son rôle. Elle rappelle que l’accompagnement est un dialogue vivant, et non une transmission descendante.
En conclusion : accompagner, c’est marcher à côté
La posture du thérapeute, c’est celle de celui qui marche à côté, pas devant.
C’est un art délicat qui demande présence, discernement et humilité.
Accompagner sans imposer, c’est permettre à chacun de retrouver sa liberté intérieure, de redevenir auteur de sa vie.
Comme le dit Carl Rogers, fondateur de l’approche centrée sur la personne : “Le curieux paradoxe, c’est que lorsque je m’accepte tel que je suis, alors je peux changer.”
Le rôle du thérapeute n’est donc pas de transformer l’autre, mais de l’aider à s’accueillir pleinement, dans la conscience de ses forces, de ses limites et de son potentiel.
C’est dans cet espace d’écoute, de respect et de liberté que peut éclore la plus belle des transformations : celle qui vient de l’intérieur.